Modeste par sa mise en forme et sa muséographie, elle ne laisse pas indifférent, l’exposition sur les requins à l’Aquarium de la Porte Dorée…
Sans grand spectacle, on s’étonne de leurs mœurs multiples, tantôt ovipares tantôt vivipares (mais pas mammifères, hein, on reste entre soi), ou devant leur squelette fait non pas d’os mais de cartilages, plus souples, ce qui leur confère des possibilités acrobatiques inégalées.
On se prend à réfléchir devant leur capacité de détection des champs électriques émis par leurs proies… peut-être nos téléphones portables nous protègent-ils de leurs attaques ? J’emmène le mien à la plage cet été ! Mais ils capteront toujours les battements de cœur irréguliers, ou l’odeur d’une seule goutte de sang, à plusieurs centaines de mètres…
On frémit devant la mâchoire fossile d’un de leurs glorieux ancêtres (un bon deux mètres d’ouverture, des dents triangulaires de 15 cm de haut, pour une bête estimée à 20 mètres de long et 20 tonnes. Engin qui aurait pu mettre à mal le tourisme balnéaire mais qui n’a pas trop dérangé nos ancêtres, ayant quitté la scène il y a 2 millions d’années.
On y apprend aussi que ce personnage forcément maléfique qu’est le requin n’en a plus pour très longtemps à terrifier les baigneurs de Floride. Pour certaines espèces, 90% de la population a disparu au cours des dix dernières années. Chouette ? Non, parce la vie océanique est un machin compliqué qui a mis 4 milliards d’années à se mettre en place et à trouver les bons réglages. Et que le requin est en haut d’une chaîne alimentaire, en particulier il mange les poissons carnivores, lesquels mangent les poissons herbivores, lesquels mangent les algues. Qui mangent le corail. Qui abrite d’autres espèces, etc. Sans requin tout cela se déstabilise et au final plus personne ne mange les algues. Et le corail crève.
Selon d’autres sources (greenpeace), 10 % de la flotte de pêche mondiale réalise 80 % des prises totales (ça vient de là, l'expression "pêche industrielle"....). Parmi ces 10 %, deux tiers (parfois beaucoup plus) sont des prises « accidentelles » (non désirées) qui sont rejetées à la mer. Un artefact. Une tâche sur la coque. Un effet secondaire, on dirait en langage médical. Plusieurs millions de tonnes de poissons, 100 millions de requins et de raies, 300 000 cétacés, mais aussi des phoques, des tortures de mer, des centaines de milliers d’albatros (si !) sont ainsi détruits chaque année... Pour rien. Ces chiffres sont d'ores et déjà en baisse. Non parce que la surpêche cupide et aveugle se rationnalise enfin, mais parce que les populations marines sont à bout : elles ne nous supportent plus. J'ignore quand et comment notre espèce aura à payer la facture, mais elle risque d'être salée...
On continue ? Moi, ça commence à m’agacer…
Bertrand Gilot